Sujets des concours de philosophie 2007
Tous les sujets de philosophie des concours session 2007.
CAPES interne
pas de CAPES interne de philosophie session 2007.
AGRÉGATION interne
30 et 31 janvier 2007
- Première composition de philosophie : explication de texte
Durée = 6 h 30.
Le candidat a le choix entre les deux textes suivants.
Texte n° 1 :
Texte n°2 :
- Deuxième composition de philosophie (se rapportant au programme de terminale)
Durée = 7 h
Les divers sens du mot culture peuvent-ils être ramenés à l’unité ?
CAPES externe et CAFEP
19 et 20 mars 2007
- Première composition : dissertation.
Durée = 6h
De quoi y a-t-il histoire ?
- Deuxième composition : explication de texte.
Durée = 6h
On ne veut voir dans la perception qu’un enseignement s’adressant à un pur esprit, et d’un intérêt tout spéculatif. Alors, comme le souvenir est lui-même, par essence, une connaissance de ce genre, puisqu’il n’a plus d’objet, on ne peut trouver entre la perception et le souvenir qu’une différence de degré, la perception déplaçant le souvenir et constituant ainsi notre présent, simplement en vertu de la loi du plus fort. Mais il y a bien autre chose entre le passé et le présent qu’une différence de degré. Mon présent est ce qui m’intéresse, ce qui vit pour moi, et, pour tout dire, ce qui me provoque à l’action, au lieu que mon passé est essentiellement impuissant. Appesantissons-nous sur ce point. En l’opposant à la perception présente, nous comprendrons déjà mieux la nature de ce que nous appelons le « souvenir pur ».
On chercherait vainement, en effet, à caractériser le souvenir d’un état passé si l’on ne commençait par définir la marque concrète, acceptée par la conscience, de la réalité présente. Qu’est-ce, pour moi, que le moment présent ? Le propre du temps est de s’écouler ; le temps déjà écoulé est le passé, et nous appelons présent l’instant où il s’écoule. Mais il ne peut être question ici d’un instant mathématique. Sans doute il y a un présent idéal, purement conçu, limite indivisible qui séparerait le passé de l’avenir. Mais le présent réel, concret, vécu, celui dont je parle quand je parle de ma perception présente, celui-là occupe nécessairement une durée. Où est donc située cette durée ? Est-ce en deçà, est-ce au delà du point mathématique que je détermine idéalement quand je pense à l’instant présent ? Il est trop évident qu’elle est en deçà et au delà tout à la fois, et que ce que j’appelle « mon présent » empiète tout à la fois sur mon passé et sur mon avenir. Sur mon passé d’abord, car « le moment où je parle est déjà loin de moi » ; sur mon avenir ensuite, car c’est sur l’avenir que ce moment est penché, c’est à l’avenir que je tends, et si je pouvais fixer cet indivisible présent, cet élément infinitésimal de la courbe du temps, c’est la direction de l’avenir qu’il montrerait. Il faut donc que l’état psychologique que j’appelle « mon présent » soit tout à la fois une perception du passé immédiat et une détermination de l’avenir immédiat. Or le passé immédiat, en tant que perçu, est, comme nous verrons, sensation, puisque toute sensation traduit une très longue succession d’ébranlements élémentaires ; et l’avenir immédiat, en tant que se déterminant, est action ou mouvement. Mon présent est donc à la fois sensation et mouvement ; et puisque mon présent forme un tout indivisé, ce mouvement doit tenir à cette sensation, la prolonger en action. D’où je conclus que mon présent consiste dans un système combiné de sensations et de mouvements. Mon présent est, par essence, sensori-moteur.
Henri Bergson, Matière et mémoire, p. 152-153, PUF/Quadrige.
AGRÉGATION externe
23, 24 & 25 avril 2007
- Première composition.
Durée=7h
La parole.
- Deuxième composition (sur thème).
Durée=7h
L’action requiert-elle décision d’un sujet ?
- Troisième composition (histoire de la philosophie).
Durée=6h
À supposer que rien ne soit « donné » comme réel sinon notre monde de désirs et de passions, que nous ne puissions remonter ou descendre à aucune « réalité » si ce n’est justement la réalité de nos pulsions — car la pensée n’est que le rapport mutuel de ces pulsions —, n’est-il pas permis d’essayer de poser la question : ce donné ne suffit-il pas à comprendre aussi, à partir de ce qui lui ressemble, le monde prétendu mécanique (ou « matériel ») ? Le comprendre, je veux dire, non pas comme une illusion, une « apparence », une « représentation » (au sens de Berkeley et de Schopenhauer), mais comme ayant le même degré de réalité que notre affect lui-même, — comme étant une forme plus primitive du monde des affects, dans lequel tout se trouve encore enclos en une puissante unité, tout ce qui ensuite se ramifie et se développe dans le processus organique (et aussi, bien entendu, se fragilise et s’affaiblit), — comme étant une sorte de vie pulsionnelle dans laquelle sont encore synthétiquement liées les unes aux autres toutes les fonctions organiques, comprenant autorégulation, assimilation, nutrition, élimination, métabolisme, — comme étant une préforme de la vie ? — Finalement, tenter cet essai, ce n’est pas seulement permis : c’est exigé en conscience par la méthode même. Ne pas admettre plusieurs sortes de causalité aussi longtemps qu’on n’a pas poussé jusqu’à ses limites les plus extrêmes (jusqu’à l’absurde, si l’on peut dire) l’essai pour qu’une causalité unique suffise : c’est une morale de la méthode à laquelle on n’a pas le droit de se soustraire aujourd’hui ; cela s’ensuit « de sa définition », dirait un mathématicien. La question est finalement de savoir si nous reconnaissons la volonté effectivement comme ayant de l’effet, si nous croyons à la causalité de la volonté. Si c’est ce que nous faisons — et au fond croire précisément en cela c’est croire en la causalité elle-même —, nous devons alors faire l’essai de poser par hypothèse que la causalité de la volonté est la seule causalité. La « volonté » ne peut naturellement avoir de l’effet que sur de la « volonté » — et non sur de la « matière » (non sur des « nerfs », par exemple) ; bref, on doit risquer l’hypothèse selon laquelle partout où l’on reconnaît des « effets », la volonté a de l’effet sur de la volonté — et selon laquelle tout ce qui arrive mécaniquement, dans la mesure où une force y est active, est précisément force de volonté, effet de volonté. — À supposer enfin que l’on parvienne à expliquer que toute notre vie pulsionnelle est le développement et la ramification d’une seule forme fondamentale de volonté — à savoir la volonté de puissance, ainsi que c’est ma thèse — ; à supposer que l’on puisse reconduire à cette volonté de puissance toutes les fonctions organiques et trouver aussi en elle la solution du problème de la reproduction et de la nutrition — c’est un seul et même problème —, on se serait ainsi acquis le droit de déterminer univoquement toute force effective comme volonté de puissance. Le monde vu de l’intérieur, le monde déterminé et désigné par son « caractère intelligible » —, il serait précisément « volonté de puissance », et rien de plus.
Nietzsche, Par-delà bien et mal, § 36
(nouvelle traduction, inédite)